L'enlèvement récent de notre compatriote au Kenya, et son transport en Somalie, illustre certaines dérives du tourisme contemporain. Cela ne doit pas nous interdire d'en pointer les côtés positifs.
Le premier, c'est l'absence de discrimination dont font preuve les ravisseurs au moment de choisir leur victime: personnes à mobilité réduite et/ou du 3e âge, cardiaques, diabétiques, autant d'otages qui nécessitent des aménagements, une logistique, devant lesquels les rançonneurs ne rechignent nullement.
Ensuite, de tels enlèvements nous permettent d'envisager ce que serait un tourisme véritablement équitable. Certains pays, comme le Kenya, qui bénéficient d'une stabilité politique, d'infrastructures, et de plages de sable blanc, peuvent parfaitement servir de relais à d'autres, dépourvus de tels avantages, en drainant la clientèle vers des villages-vacances et autres resorts, où les touristes pourraient aisément être enlevés et (éventuellement) restitués après paiement d'une rançon. Ainsi la manne touristique pourrait-elle irriguer des endroits reculés, qui n'auraient pas les moyens de se livrer à des investissements lourds - comme par exemple clôturer les plages fréquentées par les touristes afin d'en interdire l'accès à leurs propres concitoyens. Des pays, en somme, pour lesquels l'ouverture de bars, de clubs de gym et de salons de massage ne serait pas la priorité.
Et puis, la fin de la sanctuarisation des zones touristiques, et le fait que le touriste devienne une cible comme une autre, mettrait peut-être un terme à ces expéditions de back-packers, de familles entières, voire de ministres, dans des pays dictatoriaux, ou simplement des pays pauvres, où le brave touriste pense apporter des dollars en échange de quelque photo de gamin mendiant à la sortie du bus.
Que le touriste ne soit plus considéré comme un idiot culturel, soit. Mais il est trop souvent un idiot géopolitique.
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