21 septembre, vendredi, Macapá
8h30 Petit déjeuner abondant avec Reinaldo. Je me suis couché tôt hier, cafardeux, je me réveille avec un fond d’angoisse que je ne parviens pas à étouffer. Conversation sur la forte identité de l’IBAMA (hélicoptères, tenues beiges, gilets à poches multiples) dans l’imaginaire brésilien ; pour les populations locales c’est souvent le seul rapport qu’ils aient avec l’autorité de l’Etat (cf Saba de Vila Velha : o Ibama toma conta da Uniao). Puis Reinaldo m’explique que les députés et élus locaux pratiquent chasse de loisir, laissent leurs armes chez caboclos en échange de faveurs, l’un de ces élus avait réussi à accompagner l’expédition Cousteau et à prendre position GPS des zones les plus poissonneuses, idem pour les militaires qui ont accompagné l’expédition Jari pour repérer les zones giboyeuses. La demi-confession d’Estela l’autre jour laisse entendre que les Indiens ouvrent les portes de la réserve à ces élus, en échange de quoi ?? Il y a un an, c’était l’armée qui était allé pêcher sur le Curipi ; on m’avait laissé entendre que c’était un prétexte, s’agissant en réalité d’une mission de fiscalizaçao, mais je soupçonne maintenant que c’est la fiscalização qui était le prétexte…
22 septembre, samedi, Macapá.
Conversation avec Reinaldo sur internationalisation de l’Amazonie. Il pense qu’il y a menace réelle, comme le montre récent discours de Lula : « A amazônia tem dono »
CDB 1992 : reconnaître souveraineté en échange de responsabilité vis-à-vis diversité => obligations internationales en termes de superficie protégée.
Atteinte à souveraineté ? L’argent international PPG7-Arpa, dinheiro vem de fora, dinheiro do PAC vem de dentro.
Le pb de communauté internationale n’est pas que de vastes espaces soient inoccupés, mais le fait que de vastes espace soient dévastés.
Cela me renvoie à conversation d’hier Expo meio do Mundo quand un garimpeiro m’a interpellé pour dire que SNUC et corredor da Amazonia était destiné à garder l’or pour l’Etat.
Pourquoi Lula insiste tellement sur l’agriculture ? Les fronts pionniers et modèle de développement actuel de l’Amazonie aboutissent à appauvrissment pop concernées (cf terra di meio : PIB augmente avec la violence puis redescend. Maranhão dévasté. MT dévasté et enrichi mais soja entraîne peu de main d’œuvre.
Pt de Reinaldo : 1) la création d’UC devrait faire l’objet d’un débat public – je réponds que plupart intéressés n’ont pas capacité intellectuelle de percevoir enjeux, faute d’éducation et d’information. 2) mécanisme de compensation pour non dévastation lui paraît raisonnable ; j’objecte que la compensation vient déjà sous forme de soutien institutionnalisé (ARPA) et multiples ONG qui financent à tour de bras. Comme exemple de généralisation à tous public de ce débat, je lui cite la manière dont d.Sueli de Vila Velha interprète les compensations : création de 120 emplois de fonctionnaires. Et cette revendication est certainement le fruit de discussions collectives, car Saba lui-même évoque le fait que ce n’est pas que le gvt brésilien qui protège l’Amazonie, mais aussi d’autres pays.
2° encontro dos povos da floresta, cit in El Pais – BBC Brasil 20 de setembro : « A Amazônia tem dono” répondant à critiques des écologistes.
Sur question internalisation amazonie: A.J. BARROS O Conceito Zero, SP, Geraçao editorial 2006 (cite Templiers, CIA, etc; existence d’un complot visant à priver Amazonie souveraineté.)
De cinq heures de l’après midi à minuit à l’expo milieu du monde, rencontré jolie fille nommée Dorys, de Santarém, mère de deux enfants, très chatoyante… J’espère la revoir aujourd’hui et qu’elle ne va pas me prélever un rein.
Ambiance un peu folle hier, entre défilé de Miss (Miss Oiapoque, Miss Pedra Branca do Amapari, mi costume de carnaval mi indigène, chorégraphie chaloupée, plus démos de Marabaixo franchement mauvaises. Lauro a trouvé namorada, une blonde bien faite.
Un garimpeiro frustré m’a interpellé sur les parc (raison de ma discussion de ce matin avec Reinaldo) : gvt garde l’or pour lui.
Midi. Reinaldo prépare le churrasco, nous sommes allés au marché acheter du poisson. La gurijuba est un poisson chat d’un mètre et plus, massif, avec front armé jusqu’à nageoire dorsale surmonté d’une longue pointe présentant texture similaire à antenne de langouste.
Il fait une chaleur insupportable et dans tous les quintais les gens du Bairro Jesus de Nazaré brûlent les feuilles… Bonne musique en arrière-plan.
23 septembre, dimanche : soirée foireuse hier avec Dorys, toute pimpante mais ne donnant rien. 50 reais claqués en taxis et tours de manège pour sa fille. Je n’ai aucune disposition à flirter, tous les préliminaires sont d’un poids insupportable. Et elle n’est pas à proprement parler une tête folle : sa mère est morte en accouchant d’elle, son père ne lui a jamais pardonné, il la battait avec une chaîne de vélo, elle a onze frères et sœurs, etc. Face à cela je ne vois pas ce que je pourrais proposer. Elle m’a montré sa chambre, dans un cortiço : petite pièce sans eau d’environ douze mètres carrés, qu’elle partage avec sa fille. 12h Je suis allé rejoindre Dorys chez elle, elle voulait m’emmener à Fazendinha, elle n’était pas prête, et j’ai pensé aux heures qu’il me faudrait passer sous le cagnard. J’ai préféré lui dire qu’il était illusoire de penser que nous nous reverrions, qu’il était inutile d’espérer qu’elle serait mon assistante comme nous le disions la veille. Elle est restée muette, « sem ação » a-t-elle dit, déçue. Je ne sais si j’ai voulu être honnête, ne pas abuser d’une jolie fille, ou si j’ai juste voulu m’en débarrasser à moindre coût.
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