Le peu de venin qu'il me reste... A peine paralyserait-il une mouche. C'est donc un bébé moucheron que je vise.
Voici ce que publie Le Monde (Mercredi 5 novembre, p.5), article intitulé: "La campagne de M. Obama inspire les conseillers de M. Sarkozy":
"... Mais les Français sont encore très loin de l'ultraprofessionnalisme des politiques américains: 'Obama, c'est l'entertainment en politique, analyse Christophe Lambert, communicant, membre de la cellule stratégique de l'UMP. Il applique les lois du cinéma à la politique. Un bon acteur, une bonne histoire, un bon récit. Obama, c'est la cohérence entre le héros et un scénario. C'est une superproduction politique, l'histoire d'un héros qui incarne la promesse d'une Amérique nouvelle. Il a compris, comme Nicolas Sarkozy, qu'il fallait faire de la politique un spectacle".
Qu'un petit communiquant aux ordres et aspirant à en donner vienne s'exprimer sur une campagne qui engageait l'avenir du monde pour ces huit prochaines années, sa répétition incessante de la métaphore filmique, son idée que la politique est un spectacle, idée profondément ancrée dans la classe politique française convertie au séguélisme, voilà qui mérite je crois mon ultime goutte de venin.
Comme tant d'autres, et comme hélas les chercheurs qui se délectent du constructivisme, selon lequel tout n'est que représentation, des ignares découvrent la pierre à feu et se grisent du pouvoir qu'elle leur donne. Produire des étincelles, ils savent. Mais faire du feu ? Et pour faire quoi ?
Dans le film Zoolander de Ben Stiller, Owen Wilson incarne le mannequin de l'année, qui interviewé parle de son engagement : "Il me semble important de mettre mon image au service de causes à défendre. Si je sais quelle cause je défends ? Non."
Obama a pu déployer des trésors de communication télévisuelle, user de tous les supports avec maestria, il l'a fait parce qu'il avait un projet et une vision des choses. Il a agi en fonction de ce projet, tout au long de son existence de citoyen puis de sénateur: il ne sort pas ses idées de son chapeau. Etre incapable de percevoir cela, être incapable de distinguer une mise en oeuvre rhétorique d'un ensemble d'idées et de propositions que l'on défend parce qu'on les a mûries, voilà bien qui sonne le creux, mais aussi le glas, d'une pensée politique française. Ne pas distinguer la mobilisation contextuelle d'un arrière-plan constitué de problèmes à résoudre et d'espoirs à assouvir, c'est le piège dans lequel tombent, hélas, nombre de scientifiques également.
Le résultat : un conseiller ayant accès au président de la République regarde la campagne d'Obama et non l'état de l'Amérique, ni le projet du candidat. Comme l'idiot regarde, non la lune, mais le doigt.
c'est pas du venin qu'il faut gaspiller, c'est de mépris qu'il faut ensevelir ces communicants à la noix. La politique spectacle est à la politique ce que ... tiens, çà m'énerve tellement que je ne trouve pas de chute.
Rédigé par : Narayan | jeudi 06 nov 2008 à 20:40