Il est dix
heures du matin, le temps est gris et le vent souffle. Dans la grande cuisine
ma tante va et vient, passant la cire, poussant le feu. La chienne Sarah
couchée à mes pieds sent le chien mouillé.
Soudain le
drame éclate : ma tante perd un verre de ses lunettes.
Comme elle
a arpenté toute la maison il est quasiment impossible de savoir où le verre est
tombé. « J’étais sur l’escabeau quand j’ai entendu un bruit »
dit-elle.
Une
demi-heure de recherche, en vain.
Je suis
arrivé avant-hier soir, directement de Neverland. Une éclaircie hier matin, et
depuis il pleut sans cesse. Sarah ne fait que de brefs séjours dehors, puis
elle se colle à la porte demandant qu’on lui ouvre. Quatre chats sur six ont
franchi l’hiver.
J’ai passé
la journée d’hier à dormir. Besoin incroyable de repos, de délassement.
Petite cure
de télé, également. Sur la trois, interview décontractée de Bernard-Henri Lévy.
Ma tante le trouve sympathique et intelligent. Il me vient à l’idée que depuis
longtemps les intellectuels ont renoncé à la télévision. Il existe donc, dans
les programmes, une nébuleuse d’intellos médiatiques, génétiquement modifiés pour donner une impression de sagesse, qui donnent à percevoir au
bon peuple ce à quoi ils ressemblent, en forçant un peu le trait :
élégants, polis, spirituels ; on n’en demande pas plus ; dormez
tranquille, ici l’on pense.
Et les
tunnels de publicité : voiture, encore voiture, ah, du poulet. Et ce
poulet figurez-vous n’a pas besoin de label : le Père Dodu a sélectionné
pour vous ces volailles élevées à cent pour cent avec une alimentation végétale !
Peu importe que ce soit du soja et que les volailles en question aient agonisé
dans des entrepôts gigantesques. Et encore du poulet ! Cette fois-ci, un
coq et une poule blanche paraissent s’enlacer : le bon poulet le Gaulois a
sélectionné pour vous des filets tendres et savoureux. Là encore, ces
volailles sont issues de l’élevage industriel ; les présenter sur une
meule de foin sur fond de soleil couchant relève de l’intoxication.
La maison
semble cernée par un gigantesque goutte à goutte. Le feu tombe, repart, se tait
à nouveau. Les bûches d’acacia se calcinent lentement, lentement. Les oiseaux
chantent malgré la pluie.
Concernant l'hypocrisie des pubs pour la volaille, ils font fort aussi en précisant "né, élevé et PREPARE en France"... "Préparé" bien pratique pour ne pas dire que ces gentils poulets qu'on voit s'enlacer ou gambader dans la pub ont été "plumés, tués, vidés et mis sous plastique en France", ils sont tellement prévenant en permettant aux gens de conserver leurs œillères et de ne pas voir la réalité!
Il y a aussi cette très scientifique pub charal qui présente l'être humain comme le plus grand des carnivores : il suffit de regarder la dentition de notre mignon petit chat mangeur de croquettes pour voir que même lui est un plus grand carnivore que nous.
Rédigé par : Noémie | lundi 01 mar 2010 à 10:34
Noémie, je crois que vous vous faites des illusions en pensant que la connaissance des conditions d'abattage des poulets dissuaderait les gens d'en manger. C'est comme si vous pensiez que la vue d'un clochard pousserait les gens à l'aider.
Ce qui me dérange, c'est la propagande, le martèlement de mensonges que la télé fait subir. Pour le reste, il faut exercer une action de lobbying sur les pouvoirs publics afin de mettre un terme à l'élevage industriel (ou à l'industrie de l'élevage, terme plus approprié...)
Rédigé par : anthropopotame | lundi 01 mar 2010 à 10:52
Je ne pense pas que mettre les gens face à la vérité ferait changer tout le monde d'avis (certaines personnes disent clairement qu'elles savent mais assument leur lâcheté...) mais je ne suis pas pour qu'on leur facilite la tâche en camouflant la réalité! Je trouve que cette "omission" de certains faits, constitue aussi un mensonge communiqué par la télé.
Ensuite, pour ce qui est d'un réel "combat" pour faire changer les choses, pour ceux qui en plus de connaître la situation veulent la modifier, je suis d'accord qu'il faut passer par les pouvoirs publics et l'industrie.
Dans la même idée, je ne pense pas que les actions que l'on voit dans les rues, d'assos qui distribuent des tracts remplis d'images d'animaux maltraités soient très efficaces pour faire avancer les choses...
(Mais j'avoue qd même que j'ai une certaine tendance à me faire trop d'illusion sur les capacités de l'être humain malgré un fort cynisme et un air désabusé!)
Rédigé par : Noémie | lundi 01 mar 2010 à 11:25
Mais Noémie, pourquoi parler de lâcheté? Il y a simplement des gens qui se foutent de savoir que des poulets souffrent.
Lorsqu'on défend une cause, on le fait parce qu'on juge qu'elle est urgente et importante. Mais des millions de gens n'ont pas le même ordre de priorité, ce qui permet d'ailleurs à toutes les causes d'être traitées simultanément.
Allez expliquer à quelqu'un qui veut adopter un petit haïtien qu'il faut qu'il arrête de manger du poulet, il vous rira au nez.
C'est une donnée du réel et c'est pourquoi je n'ai pas apprécié les commentaires des jeunes végétariens qui traitaient mes lecteurs d'idiots parce qu'ils mangeaient de la viande.
Rédigé par : anthropopotame | lundi 01 mar 2010 à 11:38
En fait j'ai parlé de lâcheté parce que plusieurs personnes qui m'ont dit ça ont utilisé ce mot! Mais c'est vrai qu'ils constituent un groupe particulier, à côté d'un autre groupe pour qui effectivement il y a d'autres priorité et d'un autre qui n'en a juste rien à faire, etc.
C'est ce que j'aurais tendance à reprocher à certains végétariens qui tentent de jouer sur la culpabilité pour "convertir" le plus de monde possible au végétarisme. Il faudrait déjà changer la façon dont notre société tue les animaux qu'elle mange et en manger le minimum, ça on peut le défendre avec un argumentaire raisonné. L'empathie avec les animaux, le fait de ne pas supporter leur souffrance c'est au delà de la raison on ne peut pas l'imposer aux gens, il me semble.
En tout ce blog et ces discussions sont très intéressants vu que je découvre à peine le "milieu du végétarisme"! (je ne suis végétarienne que depuis 10 mois dont seulement 4 en France)
Rédigé par : Noémie | lundi 01 mar 2010 à 11:51
Eh bien je te conseille d'aller faire un tour chez Veggie et sa blogroll (lien à gauche vers Insolente Veggie). Moi je suis plus ou moins végétarien, disons que je suis mangeur de viande occasionnel et hyper sélectif.
Mais tu as raison d'employer le mot "convertir", cela s'apparente en effet à une position morale que chacun, une fois qu'il l'a adoptée, se met en devoir de faire partager.
Tu as dû découvrir en lisant ce blog que j'étais nul comme leader d'opinion :) Mais je ne désespère pas de devenir un jour un vrai dictateur.
Rédigé par : anthropopotame | lundi 01 mar 2010 à 12:51
Oui je connais le blog "Insolente veggie" (d'ailleurs je crois que c'est là que g trouvé le lien vers ton blog), il est génial, j'adore!
En tout cas j'arrêterai de suivre ce blog quand tu seras un vrai dictateur, ça serait incompatible avec mon amour de la liberté! (et avec mon projet de créer ma propre dictature pour pouvoir être enfin libre à 100% justement)
(Je me permets le tutoiement plus adapté au web et puis plus sympathique je trouve, même si ça me gène un peu vu que j'ai cru comprendre que tu/vous es/êtes prof et chercheur et que j'ai encore mon âme de petite étudiante... ça ne tu/vous dérange pas?!)
Rédigé par : Noémie | mardi 02 mar 2010 à 11:11
Huhu, que nenni, cela ne me dérange mie.
Faites, mon amie, faites! :)
Rédigé par : anthropopotame | mardi 02 mar 2010 à 11:31