Petite fête chez moi samedi. Faible affluence, mais grâce à Dieu je suis pourvu d'un nombre impressionnant de cousines russes et grecques, elles-mêmes ayant nombre d'enfants, ce qui permet d'improviser une soirée à n'importe quel moment du jour ou de la nuit.
Voici la disposition des tables et chaises, quelques instants avant l'heure H.
Etant un hôte parfait, je ne pouvais me permettre de passer du temps avec mes invités. Occupé à aller et venir, chercher des glaçons, découper la pastèque, j'ai compensé ce manque de dialogue par une astuce que je vous recommande: il s'agit de faire le tour des convives en leur caressant le dos.
Un peu à la manière des fourmis qui échangent des informations en frottant leurs antennes, une caresse dans le dos véhicule des messages importants tels que : "Es-tu mon ami? Tu dois être un très grand ami pour être venu d'aussi loin pour me voir; je suis content que tu sois mon ami; j'ai de l'affection pour toi; je ne fais que passer mais c'est parce que je suis un hôte parfait; oui, la prochaine fois je m'essuierai les mains avant de les passer sur ta chemise".
Une journaliste adepte du slow-food, désireuse de s'informer sur les droits des autochtones sur leurs savoirs traditionnels, avait adopté une attitude étrange mais fréquente chez les journalistes engagés: poser les questions de manière agressive (comme si les anthropologues présents étaient des suppôts du Grand Capital) et ne pas écouter les réponses. Par exemple si je lui dis que onze brevets ont été déposés en quinze ans, elle répond: c'est faux, il y en a eu plus de trente mille!
La chère Anna qui me l'avait amenée était de son côté occupée à réveiller mon voisin irascible en téléphonant devant sa fenêtre entrouverte; ceci provoqua la sortie furibonde d'icelui et un départ précipité d'Anna et de ses acolytes.
J'apprécie énormément, dans la constellation des ONG humanitaro-écolo-alternatives, la manière dont ceux qui n'en sont pas membres sont traités. Du fait que je ne passe pas mon temps à m'indigner, on croirait que je ne mérite pas de vivre. Les catégorisations opérées par leurs membres ressemblent à un jeu de culbuto: en trois mots, vous basculez dans le camp de l'ennemi. En l'espèce, je signalais à cette fervente adepte des remèdes traditionnels que les indigènes étaient les premiers, en cas de maladie, morsure de serpent ou piqûre de raie, à se tourner vers nos bons vieux médicaments, laissant entendre que leur foi en leur propre pharmacopée avait des limites.
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