Votre serviteur s'envole demain pour Cunani, via Cayenne, Roura puis Oiapoque. Cunani est un village de 80 habitants, communauté marronne en bordure du Parc National du Cap Orange (Amapa), éphémère République indépendante soutenue par la France dans les années 1890. J'y suis déjà allé il y a trois ans, voir ici et ici.
Les choses sont à présent différentes: je dirige une équipe composée de quatre jeunes femmes, dont deux de 23 ans. La chef adjointe est l'agent Dorothée, car tel était mon bon plaisir.
Je suis supposé prévoir à peu près tous les pépins imaginables, raison pour laquelle je m'entraîne en jouant à Virtual Villagers sur mon nouvel ordinateur. Malaria, chique, papillonite, infections diverses... Le village en lui-même est plutôt paisible, centré sur la production de palmier wassaï et de manioc. Le confort est acceptable: il y a dans le village même une base de l'Institut Chico Mendes, en charge de la gestion du Parc National.
La mission durera trois semaines, et Philippe m'a donné une liste de renseignements à demander à Oiapoque pour son programme frontalier. Je vais revoir des gens que j'aime bien, mais je dois reconnaître que l'enthousiasme n'est plus au rendez-vous. L'intérêt de ce terrain est qu'il est davantage centré sur les questions de géosymbolique (représentations territoriales, lieux clés, etc.), sachant que de toute façon les autorités brésiliennes ne tolèrent quasiment plus aucune recherche portant sur les savoirs en termes de biodiversité ou de thérapeutique.
En Amazonie même, il est ardu de trouver un village qui n'ait pas vu défiler trois ou quatre anthropologues. Les Indiens Wayampi, par exemple, se sont tellement professionnalisés au contact de mes confrères qu'ils font eux-mêmes leurs arbres généalogiques. Les Indiens Pataxo de Bahia, eux, ont tant d'instituteurs qu'il n'est pas un vieillard qui n'ait été pressuré jusqu'à obtenir l'ultime goutte de son savoir traditionnel, donnant des ouvrages didactiques en première pression à froid.
Bref, les anthropologues ont intérêt à se donner de nouveaux objectifs et de nouveaux terrains, raison pour laquelle je me recentre sur les villages vendéens.
Mais bon, au cas où je ne reviendrais pas, merci à mes lectrices et à mes lecteurs pour ce bout de chemin...
Avez-vous penser à laisser un mot à votre notaire laissant des instructions pour l'oeuvre de votre vie (j'entends le présent blog) ?
Rédigé par : Bardamu | mardi 10 août 2010 à 11:21
comme si tu n'allais pas revenir, puis quoi encore ?
Rédigé par : Narayan | mardi 10 août 2010 à 22:54
Bonjour mon ami. Je pense à vous. Ce sera notre secret.
Rédigé par : Silvère | vendredi 13 août 2010 à 12:27