Profitons de la visite en France de Hu Jintao pour évoquer la Chine, perle d'Orient, sous l'angle d'un produit-phare: la fourrure.
Avant d'aborder la question des modes de production d'animaux à fourrure, disons, à la décharge de nos amis Chinois, que les humains ne sont pas mieux traités en Chine que les chiens, les ours ou les tigres.
C'est donc, de ce point de vue, une société égalitaire, confinant même à l'antispécisme inversé. Qu'un humain reçoive le prix Nobel de la Paix ou qu'un animal soit considéré comme un être sensible, aucune discrimination n'est établie entre ces deux ordres de choses: elles sont toutes deux foulées au pied.
Voyons les cols de fourrure. Ils sont si abondants et si peu chers que le public ne se pose nullement la question de savoir d'où ils viennent, estimant sans doute qu'ils sont artificiels, ou prélevés sur des animaux fatigués ou malades, écrasés par des camions, noyés dans le Houang Ho ou le Yang-Tse.
D'ailleurs, ils sont omniprésents, on les remarque à peine. Je parle d'un type de col particulier que voici, photographié à la sauvette dans la rue ou le métro, dans la journée d'avant-hier où il ne faisait même pas froid:
Cette fourrure de couleur beige-fauve comporte trois types de poils: des longs et clairs, des moyens beiges, et l'ensemble est soutenu par un duvet tirant vers le gris, ce qui donne à l'ensemble un aspect flottant et changeant, quasi moiré.
Une telle fourrure n'est pas produite par l'intervention du Saint Esprit: elle appartenait à un animal bien particulier, le chien viverrin (Nyctereutes procyonides), en anglais Racoon dog, et en japonais Tanuki. Ce chien sauvage évolue tout au long du cercle polaire, depuis la Scandinavie jusqu'à la pointe orientale de l'Asie dont il est originaire. Le voici:
Et en variété grise-argentée:
Les principales souches d'élevage sont à présent situées en Chine. On le sait, les animaux à fourrure vivent une vie misérable et connaissent une mort peu enviable, dans la mesure où tous les moyens sont bons pour 1) réduire les frais d'élevage et 2) ne pas abîmer la fourrure.
On ose à peine imaginer ce qui entre dans la composition de la pâtée de ces chiens si l'on songe à ce que les industriels chinois, bouillants capitalistes, ajoutent au lait maternisé.
Un petit film signé PETA pour comprendre le procédé d'abattage:
Ceci ne concerne que le chien viverrin. Voici une vidéo qui présente d'autres espèces, porte davantage sur les conditions de détention, et mentionne la réglementation chinoise associée à ce type d'élevage:
Mon militantisme ne va pas jusqu'à vouloir imposer mon indignation à mes lecteurs, qui sans doute ont d'autres chats à fouetter.
Rappelons simplement l'essentiel: ces cols ne sont pas fabriqués avec de la fourrure artificielle, ils dérivent d'animaux bien vivants. La mort de ces animaux ne peut être considérée comme naturelle ou dérivant d'aléas propres à tout être vivant (vieillesse, chute accidentelle, suicide, longue et cruelle maladie). Ils sont tués à coup de cric ou de tuyaux de plombs, après avoir souffert toute leur vie.
Le devoir de tout commerçant est d'informer sa clientèle de la provenance de ses produits, et dans le cas des vêtements, d'indiquer l'animal concerné, ses conditions d'élevage, en plus, évidemment, de nous dire l'âge du bambin qui l'a fabriqué. Cela s'appelle le "devoir d'information", il figure en toutes lettres dans le code du commerce.
Encore faut-il que le consommateur souhaite en bénéficier...
Totalement d'accord avec vous ..
La fourrure est à la mode, alors tout le monde l'a porte sans vraiment se soucier de que c'est..
Avec la prolifération des fourrures de lapins, toutes les "fashions victimes" se jettent dessus
mais en réalité ce ne sont pas elles les victimes ..
bonne continuation pour votre blog
Laurie
Rédigé par : Laurie | samedi 06 nov 2010 à 09:59
Mon cher anthropopo, encore faudrait il que le commerçant veuille informer sa clientèle... Si tu savais la pauvre bergère que je suis toujours a traquer l’étiquette... et si l'information que je cherche n'y est pas donné, je demande aux vendeuses/vendeurs... La réponse qui m'est invariablement donnée
- bah vous savez ma bonne dame, faut pas se leurrer, tout est fabriqué en chine de nos jours etc achetez donc chez nous, vous ne trouverez rien d'autre...
mais non la bergère ne préfère pas acheter (putaing d’inter-mondialiste anticapitaliste et écologiste a la cong, je pense que c'est ainsi que l'on doit me cataloguer en gros)
rien n'est vraiment vital alors je n’achète pas...
et lorsque j'ai un doute (la dernière en date un pull aigle soit disant produit dans le respect c'est l'étiquette qui le disait et bien je vais jeter un petit coup d'oeuil ici)
http://fr.transnationale.org/
A présent, le plus dur et de transmettre ce type de raisonnement à la famille, la belle famille surtout qui si il pouvait noierait sa petite-progéniture sous du plastique bourré de solvant et de sueur d’être humain ... leur argument étant que je leur fais de la maltraitance morale en leur expliquant pourquoi certains jouets (les plus populaires dans les cours d’école) ne seront jamais chez nous... Alors tu vois, même lorsque le consommateur est averti, il continue quand même à acheter et ce en toute connaissance de cause. Y a eu une merde lors de notre conception Antropopo, notre puce a du etre mal implantée, nous ne faisons pas partie de la matrix...
Rédigé par : bergère | samedi 06 nov 2010 à 10:03
Bergère bien aimée, c'est précisément la raison pour laquelle j'invoque le devoir d'information. Un commerçant est, légalement, tenu d'informer son client sur tout ce que celui-ci juge bon de lui demander, en rapport avec le produit. Le commerçant ne peut invoquer l'ignorance: il doit chercher l'information s'il n'en dispose pas.
Le problème est que les commerçants, non seulement ignorent la provenance de ce qu'ils mettent en vente, mais ignorent également qu'ils sont tenus d'informer le client...
Cela dit, Bergère, je pense qu'il faut s'en tenir à l'information pure et simple, ce que j'essaye de faire ici; on ne peut non plus forcer les gens à compatir au sort de ces chienchiens.
Les deux films parlent d'eux-mêmes, ils montrent une réalité, cette réalité en soi n'est pas militante: tout dépend de l'usage que l'on en fait et de la manière dont ils sont perçus.
Rédigé par : anthropopotame | samedi 06 nov 2010 à 10:41
je tique sur un point : "traditionnellement élevé en Scandinavie... souches d'élevages importées en Chine", ça me semble en contradiction totale avec l'aire géographique naturelle du chien viverrin, dit aussi "tanuki", qui est un animal originaire d'Extrème-Orient et introduit en Russie puis en Scandinavie plus récemment.
Rédigé par : Lledelwin | samedi 06 nov 2010 à 11:10
Bien vu, c'est corrigé.
Rédigé par : anthropopotame | samedi 06 nov 2010 à 11:27
Personnellement, ce qui me choque le plus, avec ces fameux cols en fourrure, c'est que vu l'endroit où ils sont placés, ils ne sont d'aucune utilité pour tenir chaud à la personne qui les porte.
J'dis ça, j'dis rien... M'enfin si c'est juste pour faire joli, y'a des tas d'autres solution élégantes en pur tissu, non ?
Rédigé par : La souris blonde | samedi 06 nov 2010 à 11:34
Très juste, souris blonde, et ma note englobe dans sa défense les cols en fourrure de souris blonde, espèce menacée :)
Rédigé par : anthropopotame | samedi 06 nov 2010 à 11:50
C'pas très poilu, les souris blondes, ça fait des cols de fourrure tout miteux, donc ça va, on s'en sort bien...
Rédigé par : La souris blonde | samedi 06 nov 2010 à 12:15
je suis d'une naïveté à toute épreuve. J'ai toujours été persuadée que ces cols ou bordures étaient en synthétique. Vu que personnellement, je trouve ça totalement tarte, je n'ai jamais pris la peine de vérifier les étiquettes.
Petit retour en arrière à une époque que les moins de 40 ans ne peuvent pas connaitre ... une époque où le boycott de la fourrure s'affichait dans les rues, une époque où justement la seule fourrure tolérée était synthétique ... parfois je me demande combien de temps sera nécessaire pour gommer tous les acquis des décennies post-68. Encore un quinquennat ?
Rédigé par : Narayan | samedi 06 nov 2010 à 23:29
Comme vous Narayan, j'étais loin de me douter que ces cols n'étaient pas synthétiques, du moins ceux que l'on voit dans les rues aujourd'hui. Je suis consterné.
En revanche, en ce qui concerne l'origine et la façon dont sont fabriqués ces produits, je ne me faisais guère d'illusion.
Et je pense qu'il n'est pas toujours si simple de choisir sa consommation, d'autant moins simple que les moyens financiers sont faibles, et les bouches à nourrir nombreuses. Je côtoie des gens qui savent bien d'où viennent leur produits de consommation, et ce qui entache leur histoire (de produit), et souvent leur qualité, qui le regrettent, à qui cela donne la nausée d'y penser, mais qui n'ont pas le choix, ou très rarement. Évidemment , la fourrure sur un manteau ne rentre pas dans la catégorie des produits indispensables, même si parfois, le conformisme vestimentaire a de l'attrait pour qui craint l'exclusion sociale. (il n'y a qu'à voir les ados ^^)
Je crains que la colère vous ait caché temporairement cette réalité, et qu'il ne faut pas systématiquement tenir les gens responsables de leur consommation.
Rédigé par : nonos | dimanche 07 nov 2010 à 08:59
Certes, Nonos, mais à présent l'information est donnée, et figure dans cette note noir sur blanc. Les gens sont responsables de leur consommation en ceci qu'ils ont le choix d'acheter ou non un produit en fonction de sa provenance ou de sa composition.
L'information que je fournis n'est pas prescriptive, mais elle donne, ce me semble, quelques éléments de décision.
On peut en effet se sentir contraint à acheter des pardessus nantis de tels cols, dont la fonction thermorégulatrice n'est pas clairement démontrée (s'agissant d'une bordure généralement laissée flottante sur les épaules, aucune photo ne montrant un usage effectif de la capuche).
On peut évoquer la contrainte en toute occasion, et j'entends souvent cet argument de la part d'Indiens vendant des espèces protégées ou prostituant leurs enfants.
Une telle contrainte, lorsqu'elle est posée par l'effet de mode, est à prendre en considération: elle tend à conforter ceux qui pensent que l'humanité est majoritairement composée de crétins.
Rédigé par : anthropopotame | dimanche 07 nov 2010 à 09:26
Je suis bien de votre avis concernant cet exemple consternant de tenue vestimentaire: "Évidemment , la fourrure sur un manteau ne rentre pas dans la catégorie des produits indispensables".
Je soulève juste que si certains produits indispensables peuvent être achetés "propres" sans surcoût, d'autres non, et que pour certaines bourses, la question ne se pose pas et ne peut se poser - bien malheureusement.
Ne croyez pas que certains n'en souffrent pas, d'ailleurs. Notre pouvoir sur ce point est conditionné à notre pouvoir d'achat.
Et je le répète, je tiens bien loin de ces considérations votre exemple de fourrure.
Ceci dit, je ne crois pas vous apprendre tout ça, mais je n'ai pas le talent d'un écrivain, il faut souvent que je m'y prenne à plusieurs fois pour être clair. ^^'
Rédigé par : nonos | dimanche 07 nov 2010 à 12:18
En ce cas, pardonnez-moi d'avoir été sec.
Rédigé par : anthropopotame | dimanche 07 nov 2010 à 12:37
Rassurez-vous, anthropopotame, je n'ai pas de talent d'écrivain, mais à peine plus de lecteur !
Rédigé par : nonos | dimanche 07 nov 2010 à 13:09
"à présent l'information est donnée, et figure dans cette note noir sur blanc."
Dépêchez-vous de l'afficher sur votre blog en 4 par 3, que toute la France, que dis-je, que le monde entier la voie bien !
Vous avez combien de lecteurs au juste ?
(Toute ironie mise à part sur votre rôle de mass media, merci pour cette note très informative, nous apprenant non seulement que cette fourrure n'est pas synthétique mais qu'elle appartient de surcroît à un animal fort mignon.)
Rédigé par : La souris blonde | dimanche 07 nov 2010 à 23:43
Effarant en effet...
Mais je ne crois pas que tout le public soit complètement inconscient ou insensible à cela. Même si cela ne concerne que 10 ou 20% des acheteurs (les propriétaires d'animaux domestiques ?), je suis sûr qu'il y a une demande pour des produits éthiques d'origine animale - parce que s'il est facile de se passer de fourrure, c'est moins le cas pour le cuir ou la viande. Mais l'offre manque et il me semble qu'aucun label ne certifie les conditions d'élevage et d'abattage (sauf le Label rouge pour les volailles ?).
Rédigé par : JX75 | lundi 08 nov 2010 à 06:21
Souris blonde, entre samedi et aujourd'hui, lundi matin, la note a été lue 477 fois samedi, 296 fois dimanche, 45 fois aujourd'hui à 9h, retweetée environ 75 fois, rebloguée trois fois.
C'est ma manière à moi de faire quelque chose, aussi ridicule soit-elle...
Rédigé par : anthropopotame | lundi 08 nov 2010 à 09:23
Bravo pour votre article. On en voit malheureusement partout. J'ai écrit récemment à Guy Lagache de M6 qui, dans sa très bonne émission Capital Terre, s'affichait malheureusement avec ce genre de cols en fourrure. Dans le TGV, j'ai vu l'autre jour deux jeunes filles qui portaient le même accoutrement (On en croise des dizaines chaque jour). J'ai interpellé leur mère poliment et lui ai montré la photo de l'animal que ses filles portaient autour du cou (je l'avais enregistrée sur mon portable), en lui expliquant que c'était le résultat d'actes barbares et d'une grande souffrance... Elle m'a répondu qu'elle travaillait pour le développement durable (le rapport !), mais m'a tout de même assuré que le message était passé. C'est un travail de fourmi et vous y contribuez largement grâce à votre article.
Rédigé par : Laurent Dingli | dimanche 27 fév 2011 à 19:37
Eh bien moi j'adore le raccoon fur. Et peu importe s'il faut dépecer des rongeurs, ça ne m'empeche pas de trouver mon manteau très beau. Le synthétique c'est tellement moche, c'est pour les pauvres.
Rédigé par : Myriam Astouri | mercredi 02 mai 2012 à 21:07
De mon côté, chère Myriam, je n'ai pas du tout souffert lorsqu'on vous a opérée du cerveau.
Rédigé par : anthropopotame | mercredi 02 mai 2012 à 21:11