Voilà longtemps que je me sens vivre dans un monde d'hallucination.
Je me souviens, il y a quelques années de cela, d'une file d'attente au Monoprix de la rue St Antoine. J'étais jeune et déprimé, c'était la période d'Halloween.
Dans la queue, avec moi, des dizaines de célibataires le teint hâve, les yeux fatigués, déposant leurs barquettes individuelles sur les tapis roulants, afin qu'elles soient saisies par de peu avenantes caissières au bord du suicide.
Mais le magasin tout entier était tendu de fausses citrouilles et de banderoles proclamant que "le centre ville [était] ensorcelé", sans compter toutes les allusions au "plaisir", aux "envies gourmandes", aux "filets de merlan qui vous ressemblent".
Le décalage m'avait paru tel entre la réalité que nous vivions et le discours de propagande que je me suis cru en Corée du Nord ou mieux encore, en Humanie.
Rien n'a changé. Le discours sur l'environnement est devenu pure phraséologie. Ce n'est pas la protection des forêts qui est en jeu, c'est leur destruction qui est désormais brandie comme arme de négociation.
Partout autour de moi je ne vois que fourrures (cols, manteaux, bordures, capes, bonnets).
Les emballages individuels et les plats préparés à base d'huile de palme et de reliquat de poulet aux hormones se multiplient.
Sur chaque rayon l'on vend tout et son contraire: le bio local, le bio martien, le non-bio local et non-local. Tout n'est qu'affaire d'emballage pour des millions de gens pressés, et d'autres qui se croient esthètes, amoureux du bon goût et du sel de Guérande.
Parler ne sert à rien et se taire non plus. Mieux vaut absorber paisiblement des résidus toxiques dans l'air que l'on respire, des métaux lourds dans la salade de thon, et des pesticides dans l'eau du robinet.
Marrant, je me disais exactement la même chose que toi ce matin (et mon chat faisait la même tronche). Comme quoi, les grands esprits (déprimés) se rencontrent!
Rédigé par : Dr. CaSo | mardi 14 déc 2010 à 00:39
Le même décalage existe dans la protection des acquis sociaux...
Les hommes politiques et l’opinion condamnent officiellement les délocalisations. Mais dans la pratique, il est difficile de savoir où est fabriqué un produit parce que ni les fabricants ni les distributeurs ne fournissent d’information sur le sujet (Darty le faisait il y a quelques années), et je suppose que si ni les fabricants ni les commerçants ne se donnent cette peine c’est probablement parce que que le consommateur est surtout sensible au prix porté sur l’étiquette.
Rédigé par : JX75 | mercredi 15 déc 2010 à 07:44
On confond souvent "le plus facile" (aka les plats préparés dégueu plein d'emballages, l'achat sans se poser de questions, la fourrure autour du col comme les copains) avec "le meilleur".
Je crois que c'est humain, en fait, et c'est ça qui est déprimant.
Rédigé par : Llyn | mercredi 15 déc 2010 à 11:27