J'ai entendu dire qu'Avatar valait pour les images, l'histoire quant à elle étant un brin puérile.
Ce n'est pas l'impression que j'en ai retiré.
La vilaine compagnie minière, épaulée par des Marines? Je renvoie le lecteur à la somme de Darcy Ribeiro, Les Indiens et la civilisation, publié dans les années 70. Les scènes décrites dans ce livre lui sembleront familières s'il a vu le film - et vice-versa.
On lira, par exemple, l'avancée du chemin de fer dans le Parana (au sud-ouest du Brésil, là où se dresse aujourd'hui la centrale d'Itaipu), dévastant les forêts, les travailleurs équipés de mitraillettes, organisant des battues à l'Indien, et les Kaingang réagissant en fermant la voie ferrée par des lianes, plantant des flèches dans les traverses.
Les destructions de villages au petit matin, hommes, femmes et enfants mitraillés, et la compagnie de chemin de fer laissant la place aux colons italiens ou allemands, prenant la relève, contractant des professionnels du massacre d'Indiens, les bugreiros.
Cela se passait dans les années 1910, 20, 30. On retrouve la même façon d'avancer avec cette idée que les sauvages s'écarteront.
L'irrédentisme se poursuivant chez les Kaingang, un inspecteur du Service de Protection des Indiens a l'idée de réunir les chefs et de les conduire à São Paulo, où ils auront l'occasion de plaider leur cause.
Ce fonctionnaire croyait bien faire, et mal lui en prit, car le résultat fut contraire à ses attentes. Voici la réaction des chefs face à la ville naissante des années 1940:
« Une tristesse et un accablement grandissant saisirent les Indiens (...). Bouche-bée, ils débarquèrent à São Paulo et firent toutes les visites programmées (...). Cette expérience provoqua un changement radical dans la posture des chefs. A présent ils avaient pleine conscience de leur insignifiance face à l'immense tribu des blancs. C'était le désenchantement d'un peuple tribal face à une société nationale, de son immensité écrasante face à leur petitesse. Depuis lors, le prestige qu'ils attribuaient au Blanc prit une telle proportion qu'aucune valeur tribale ne put persister. Ils avaient avaient appris qu'ils ne pouvaient rien face aux Blancs, sinon se rendre à leur empire.” (1996 : 300-301).
La lecture que propose Darcy Ribeiro de ce récit est que les chefs Kaingang furent démoralisés devant la révélation du pouvoir des blancs. Mais l’on peut voir ici opérer un mécanisme plus profond, et certainement plus bouleversant – à l’image des cyclopes dont on raconte qu’ils connaissaient le jour de leur mort – et c’est la révélation, devant les premiers gratte-ciels de São Paulo rompant la ligne d’horizon, que le futur, un futur impensable jusqu’alors, s’était inscrit dans l’espace. C’est la conscience brutale, non pas de leur avenir, mais du fait que cet avenir-là existe, qui a rendu vaine, pour ces Indiens, toute résistance.
Et la seule question qui était alors posée n'était pas: "avons-nous le droit de déplacer ou exterminer des peuples entiers pour planter du soja et construire des centrales?", mais, comme dans le film, de savoir si ce programme devait être appliqué de manière violente ou progressive, si les autochtones devaient être rayés de la carte à la mitrailleuse ou supprimés de manière "humaine" (humane), comme le dit le chef des Marines dans Avatar.
MàJ: je ne suis pas le seul à faire cette association d'idée: http://www.survivalfrance.org/actu/5479
Faudrait me payer très très très cher pour que j'aille voir ce film.
Rédigé par : Dr. CaSo | jeudi 28 jan 2010 à 16:40
huhu, et peux-tu étayer cette position ?
Rédigé par : anthropopotame | jeudi 28 jan 2010 à 17:08
Caso: tu te prives pour rien, tete de mule!
C'est un tres bon film. Les images sont simplement magnifiques.
Pour l'histoire, et pass'que je ne conanis rien a la colonisation/exploitation de l'amazonie, j'allais juste dire que l'histoire d'avatar ressemble furieusement a celle d'Aquablue (la BD), mais bon. La avec tes histoire Anthro, tu m'as nique ma bonne humeur matinale due a mon premier dry-Day depuis... pfff... Au moins!
Ceci dit, question: comment ce fait-il que personne n'est pense a armer ces puplations indigenes? Quand on voit les effort et le fric que Greenpeace met dans la lutte anti-balaigniers, on se dit que y'a un business a faire pour proteger les plus faibles.
Certes, on me dira que c'est pas la solution... mais comme dirait Audiard: "Je ne dis pas que c'est juste, je te dis que ca soulage".
Rédigé par : Le Piou | jeudi 28 jan 2010 à 17:41
boarf... ce n'est rien de nouveau. toutes les colonisations se sont passées de la même façon, et à toutes les époques : le peuple conquérant s'octroie le territoire d'un autre peuple sans lui poser la question et en partant du principe qu'il n'est pas humain / pas aussi intelligent que lui. le brésil, l'amérique du nord, l'indochine, l'afrique, name it.
c'est juste pour ça que le scénario n'a rien d'original.
(je pense pas que j'irai le voir au ciné, mais sans doute le louerons-nous une fois sorti en dévédé) (oui *je sais* on rate la 3D mais bon franchement...)
Rédigé par : Dodinette | vendredi 29 jan 2010 à 02:07
Certes, Dodinette, mais selon cette logique, et sachant que 90% des films mettent en scène la rencontre d'un homme et d'une femme, ou la préparation d'un braquage, on n'irait plus très souvent au cinéma, tu ne crois pas?
Avatar prend au pied de la lettre l'hypothèse Gaïa, comme le faisait en son temps Miyazaki avec la Princesse Mononoke. Le film est magnifique, je n'ai pas à en dire plus.
Pour avoir le point de vue d'un zoologiste sur avatar:
http://scienceblogs.com/tetrapodzoology/2010/01/creatures_of_avatar.php#more
Rédigé par : anthropopotame | vendredi 29 jan 2010 à 09:39
J'aurais tout de même tendance à penser avec Dodinette qu'il n y a pas révolution en matière scénaristique.
Dire ça ne veut pas dire qu'il faut proscrire toute thématique déjà empruntée. Ce n'est pas parce que le rock existe déjà qu'il ne faut pas composer de rock. On peut évidemment reprendre le thème de la colonisation. Mais le traitement proposé par avatar reste très conventionnel.
Aussi, dans le film, on ne peut pas dire que la question est de savoir comment doit se faire cette colonisation (question philosophique cohérente au XVe siècle) plutôt que de savoir si elle doit se faire (question typique du XXe siècle) : le fin mot de l'histoire, c'est tout de même que le colon est bouté hors de colonie et se voit contraint de retourner en métropole la queue entre les jambes, n'est-ce pas ?
Rédigé par : Enclume des Nuits | vendredi 29 jan 2010 à 16:03
Je précise, tout de même, que je ne suis pas du tout d'accord avec Dodinette lorsqu'elle affirme que toutes les colonisations se sont produites de la même manière. Je n'insiste pas, je lui laisse la tâche (insurmontable :) ) de prouver son allégation.
Rédigé par : Enclume des Nuits | vendredi 29 jan 2010 à 16:07
@ Enclume des Nuits: conventionnel... Mmmh, vous oubliez la Planète Pandora. Jusqu'à aujourd'hui, on n'y avait jamais tourné de films :)
Rédigé par : anthropopotame | vendredi 29 jan 2010 à 16:52
Je ne me prive de rien du tout, c'est le genre de film que je déteste, de la science fiction, de la pseudo-mythologie de bas étage, des symboles "subtiles" qui ne sont pas du tout subtiles, un film qui se prétend anti-militariste mais qui finalement justifie la guerre (si c'est pour des bonnes raisons), un hymne aux forces américaines... La formule racoleuse typique qui plaît à tout le monde et qui finira avec 15 oscars... Beurk!
Nan, en fait, même si on me payait très cher je n'irais pas le voir!
Rédigé par : Dr. CaSo | vendredi 29 jan 2010 à 19:20
Visuellement, c'est quand meme interessant d'avoir un apercu sur le cinema du futur: impressionnant! Par contre, niveau scenario, effectivement, chaque rebondissement est previsible au moins une demi-heure a l'avance, et le message est quand meme decourageant, si on considere que ce film montre que la rencontre entre deux peuples ne peut s'envisager autrement que d'une maniere brutale: l'un detruit l'autre, point final. Ou alors, dans quelques rares cas, des individus sont entierement integres d'une tribu a l'autre, en faisant completement une croix sur leur appartenance a l'autre camp. Une vision tres binaire en somme, alors qu'on aurait pu attendre, malgre les problemes inevitables, une tentative de nuance, montrant qu'il est possible que des personnes des deux camps puissent intergir et se comprendre sans s'aliener ou se detruire... Quelle que soit la fidelite du scenario avec des reelles situations de conquete passees, on est au cinema, saperlipopette, c'est donc le moment de prendre des libertes avec la realite et de proposer une vision un peu plus optimiste, de faire rever le spectateur, voire de l'inspirer, quoi...
Rédigé par : Aisling | vendredi 29 jan 2010 à 23:19
@Dr CaSo, en fait ce que tu devrais faire c'est
1- te faire payer très cher
2- ET ensuite ne pas y aller.
;)
Rédigé par : Dodinette | samedi 30 jan 2010 à 00:24
CaSo, je suppose que tu as lu l'opinion publiée dans le Monde par ce prof canadien, qui évoquait le militarisme sous-jacent. Personnellement, c'est une des analyses les plus stupides que j'aie lues. Je préfère ne pas m'étendre, assez sur le sujet...
Rédigé par : anthropopotame | samedi 30 jan 2010 à 20:23
Putain (excusez moi l'expression), qu'est-ce que ça m'agace qu'on se permette de critiquer un film SANS l'avoir vu !!!!!
Certes, c'est assez manichéen... mais les choses ne sont elles pas manichéennes par moments dans la vraie vie ?
Il est vrai cependant que les indiens (extra-terrestres) auraient pu avoir un ou deux aspects un ou deux aimables.
D'autre part, et même si c'est sans doute par nécessité commerciale d'avoir une happy-end, j'ai adoré le fait que Cameron se permette le plaisir de la scène où les gentils autochtones renvoient gentiment les Amérloques dans leur planète...
Enfin, ce n'est pas de la pure forme, les images et particulièrement les scènes de plantes, d'animaux, de contemplation de la nature sont à pleurer de beauté.
Après, c'est vrai que le scénario fait un peu littérature pour la jeunesse.
Rédigé par : Kela | lundi 15 fév 2010 à 21:58