J'aime beaucoup le secteur des maladies tropicales et infectieuses, Pavillon Laveran, à la Salpêtrière.
Je le dis sans rire. Voilà sept ans que je n'y avais pas remis les pieds, et j'ai découvert qu'ils avaient conservé tous mes dossiers depuis 1997. J'ai revu le parasitologue qui m'avait diagnostiqué la gale en 2002, il m'a raconté qu'à l'époque la gale était peu commune alors qu'aujourd'hui elle est pandémique.
Puis, au secteur "consultations d'urgences - retour de voyage", je fais un check up complet avec un jeune externe, bientôt rejoint par sa chef, et j'y retrouve l'atmosphère du labo: une forme de curiosité et d'enthousiasme qui est propre au monde de la recherche, qui fait que nous autres, aussi blasés soyons-nous, retrouvons toujours de l'intérêt pour les affaires compliquées, pleines de replis tropicaux.
En l'occurrence j'avais de multiples symptômes que j'ai reconstitués, journée après journée, reconstitution ponctuée de questions ("et la tique, c'était avant ou après l'oppression dans la poitrine?"), et de remarques adressées aux médecins de passage ("Monsieur est anthropologue..."). Comme je commence à en connaître un rayon en maladies tropicales, les discussions sont de plus en plus intéressantes, à savoir si tel traitement fait disparaître les anticorps, si le Lariam est compatible avec des antidépresseurs, si la microcytose prévient ou aggrave la malaria (en fait elle l'aggrave, il paraît que j'aurais dû prendre un antipaludéen).
Tous les médecins et infirmiers rencontrés nourrissaient un intérêt sincère pour mes pustules et bubons, en même temps qu'ils connaissaient les terrains: longs échanges sur les risques associés aux balades en forêt, aux déplacements en pirogue, aux bains d'igarapé. Je me sens plongé dans un univers familier, un peu comme si j'étais une machine à explorer une planète inconnue ou le fond des abysses, nécessitant parfois des révisions en atelier.
Quoi ? Tu prends des antidépresseurs ?
Rédigé par : Dodinette | mercredi 08 sep 2010 à 22:07
Dodinette: voir épisodes précédents: http://anthropopotamie.typepad.fr/anthropopotame/2010/01/une-petite-d%C3%A9pression.html
Rédigé par : anthropopotame | jeudi 09 sep 2010 à 08:49
Ouiii! Ils sont sympas au pavillon Laveran, n'est-ce-pas ? J'ai exactement la même impression losque je m'y rends : un monde un peu familier, de chercheurs et pour certains, de spécialistes de l'Amazonie. Discuter avec eux est passionant! Vous avez peut-être le même médecin que moi...
Rédigé par : isadora | jeudi 09 sep 2010 à 21:07
Isadora, j'en ai parlé au dr Pérignon qui m'a examiné, je lui ai dit que les anthropologues adoraient se faire soigner chez eux, elle a été flattée.
Finalement Patrick (mon ex directeur) a deviné tout seul ce que j'avais, sans même voir les lésions: le pian ou "treponema pertenue"...
Rédigé par : anthropopotame | samedi 11 sep 2010 à 00:29
Oui, finalement, sont-ils si compétents ? Mon médecin m'a dit que dans de nombreux cas, c'était ses patiens qui finissaient par trouver le bon diagnostic (grâce à leurs amis, médecins, collègues locaux...), et m'a encouragée à envoyer mon dossier médical à Sao Gabriel. Moyennement rassurant...
Rédigé par : isadora | mardi 14 sep 2010 à 10:13