La catastrophe de Fukushima offre à ceux qui, comme moi, sont dépourvus d'imagination et de vie intérieure, une métaphore bien pratique pour qualifier leur état.
En effet, chacun des 4 réacteurs a suivi son parcours propre, l'un fondant, l'autre explosant, le troisième rejetant des vapeurs radioactives et le quatrième privilégiant les lâchers d'eaux chargées de plutonium.
Etant moi-même au bord de l'explosion, je crains, si elle venait à se produire, qu'il n'y ait des retombées. En clair, je me demande si je ne dois pas envoyer bouler mes programmes de recherche pour partir enfin en vacances.
Je ne sais d'où vient mon hystérie au sujet du professionnalisme des uns et des autres, mais la défiance que l'on exprime à mon égard aboutit à ma propre défiance à l'égard de mes partenaires. Quelque chose se brise en moi lorsque j'ai le sentiment d'avoir mal placé ma confiance, et j'ai énormément de mal à faire semblant que tout continuera comme avant.
Un peu comme un ami qui vous abandonne au milieu d'une situation dangereuse: un collègue qui me rend la tâche plus compliquée provoque un début de fusion nucléaire, avec dégagement de vapeur d'eau et exposition du coeur du réacteur.
« La défiance que l'on exprime à mon égard aboutit à ma propre défiance à l'égard de mes partenaires »
C’est le principe de la réaction en chaîne utlisée à la fois dans le nucléaire militaire et dans le nucléaire civil : la fission d’un atome d’uranium 235 provoque l’émission de neutrons qui eux-mêmes vont provoquer la fission des atomes d’uranium 235 voisins.
Si l’uranium est fortement enrichi (grande proportion d’isotope 235, fissile, par rapport à l’isotope 238, non-fissile) la réaction est rapide et explosive, ce qui est le cas pour les applications militaires. Si l’uranium est faiblement enrichi, la réaction en chaîne est plus lente et s’entretient d’elle-même mais sans provoquer d’explosion, ce qui est le cas dans les applications civiles. Si l’uranium n’est pas enrichi, toute réaction s’arrêterait d’elle-même.
Si on fait une analogie entre esprit susceptible et atome d’uranium fissile, il est facile de voir que la concentration de, hum, personnalités fortes favorise les ambiances de travail explosives. J’imagine que dans un lieu de travail idéal il faut une certaine proportion d’esprits bouillonants (sinon, pas de réaction en chaîne du tout, pas d’émulation, d’inspiration...) mais pas trop forte non plus sinon la réaction devient explosive. Je laisse aux sociologues le soin d’établir la proportion idéale de personnalités « non-fissiles » dans une organisation humaine‚ et aux psychologues le soin de créer une méthode permettant de déterminer la fissibilité d’un esprit humain.
Peut-être faudrait-il embaucher des figurants dans les lieux de travail pour améliorer l’ambiance (notons qu’on règle du même coup le problème du chômage) ou, si ça coûte trop cher, embaucher des animaux (et hop, je retombe pile-poil sur le sujet de ton blog).
À lire : http://fr.wikipedia.org/wiki/Enrichissement_de_l'uranium
À écouter : http://www.dailymotion.com/video/x6bgt_telephone-la-bombe-humaine-live_music
Rédigé par : JX75 | dimanche 17 avr 2011 à 10:33
Pas mal du tout, cher JX! Tu as démultiplié le pouvoir de ma métaphore jusqu'à transformer mon programme en véritable Manhattan Project!
Rédigé par : anthropopotame | dimanche 17 avr 2011 à 12:14