Les vacances de Noël s'achevaient, Chiara était rentrée d'Italie, j'avais perdu 10 kilos. Aux premiers jours de janvier 1998, nous sommes allés voir un film, "Sunday". Les critiques disaient que le film était traversé d'éclairs d'humour, cela me semblait convenir à mon état.
Nous nous sommes engouffrés dans les sous-sols du cinéma Beaubourg, jusqu'à une salle minuscule et moite.
Le film commençait par cette phrase: "Sunday, day of Nothingness and despair", et la suite ne la démentait en rien. Un homme ayant perdu son emploi, réduit à vivre dans un foyer, se voit interpeller dans la rue par une femme qui lui demande de l'aide. Il porte des pots de fleurs jusque chez elle, elle l'invite à boire un thé. L'heure passe, ils se séparent, quand il arrive au foyer il est trop tard, les portes sont fermées, il a perdu sa place et dorénavant passera ses nuits dehors.
J'ignore si c'est mon état, ou bien la myopie des critiques, mais ce film aggrava ma prostration. Dès le début, dès les premières images, l'idée que j'étais bloqué dans ma rangée par tous ces spectateurs, qu'il me faudrait sortir dans le noir, monter des escaliers, fit monter une angoisse qui perdura plusieurs jours.
Je passai le reste de la journée à pleurer. "Cet homme n'avait pas le choix, moi j'ai le choix", mais cela ne me consolait en rien. J'étais cet homme à qui la vie tend la main pour la lui retirer aussitôt.
Rédigé par : |