Qui d'entre nous n'a pas peiné, enfant, devant un test de Rorschach, ou commenté pour un psychologue des photos noir et blanc montrant des violons ou des chemins solitaires?
Le faible contrôle que nous exerçons sur nos émotions, et les effets secondaires d'un contrôle trop poussé - perte de la joie de vivre, psychopathie - nous amènent à consulter, régulièrement, des thérapeutes dont on attend qu'ils règlent, ajustent, huilent, ces rouages ignorés qui se trouvent dans notre cerveau. Plus notre vulnérabilité est grande, plus nous sommes soumis à des êtres dont l'expérience de vie est parfois moindre que la nôtre, et dont les maladresses, voire l'incompétence, passent pour du doigté ou une incitation à la réflexion.
Voici quelques exemples de thérapies entamées et abandonnées par votre serviteur:
1) "Vivez ce que vous avez à vivre": incitation à aller au bout d'une situation sans issue, quels que soient les dégâts provoqués. Laisser se déchaîner les passions dans un univers feutré. A l'arrivée, on se retrouve dans une situation encore plus compliquée, recevant parfois une qualification pénale. De ce point de vue les tireuses de carte sont certainement plus perspicaces.
2) "On en parlera à la prochaine séance": ceci dans le cas de thérapies lacaniennes, où le patient doit se contenter pour toute réponse de "Ahum" et est éjecté après 10 minutes, la seule chose qui importe étant les 50 euros payés à l'entrée.
3) "Ce n'est pas anodin": cela lorsque vous avez exposé un événement dramatique, évidemment exceptionnel. La profondeur de l'analyse ("ce n'est pas anodin") vous ferait bondir si vous n'étiez vulnérable. Et c'est avec cette formule passe-partout que la personne en face de vous prétend améliorer votre état.
4) "Moi, moi, moi": cela lorsque le thérapeute, pétri de sa propre image, rapporte tout ce que vous lui contez à sa personne, et au lien que vous entretenez avec lui. Quels que soient les épisodes relatés, les rêves que vous racontez, il parvient toujours à distinguer, au milieu de la tourmente, sa propre moustache.
5) "Cette rupture est bonne pour vous": le meilleur pour la fin. Lorsqu'on est désespéré, on se dit: "pourquoi pas l'hypnose?". Malheureusement les hypnotiseurs ont renoncé au tralala, et veulent à tout prix asseoir leur légitimité. C'est ainsi que, connaisseur des transes chamaniques, j'eus tout de même droit à un exposé sur la "transe quotidienne", celle, paraît-il, qui nous permet "par intermittence, de traiter et comprendre nos émotions", traitement auquel, bien sûr, l'hypnose pouvait aider. Et j'appris que la rupture qui avait brisé ma vie avait des côtés positifs, que je devais m'efforcer, dans un demi-sommeil, de valoriser.
Malheureusement mon demi-sommeil était feint, cette rupture n'était pas "bonne", et je suis parti. Tout cela s'est produit il y a quelques années. Et ce n'est pas de cela que nous avons parlé au dîner d'hier, où j'étais avec quelques amis.
J'ai connu plusieurs personnes ayant fait de longues thérapies et je trouvais que ces hommes en sortaient encore plus nombrilistes, égoïstes et que le seul résultat était qu'ils disaient "Je suis comme ça, point barre, si les autres sont pas contents, tant pis, j'assume" et que leur thérapie leur avait donc appris à être en paix avec leur propre égoïsme.
Cela dit, j'ai RV chez un psy pour la première fois la semaine prochaine...
Rédigé par : Kela | samedi 03 nov 2012 à 16:50