Encore une fois, votre serviteur est soumis à de virulentes attaques émanant de son collègue Gérard Collomb, qui suggère que ce blog n'est plus "décapant". Le fut-il un jour ? Le sera-t-il jamais ?
La vérité est que, de retour de la campagne, mes doigts sont gourds encore d'avoir tenu la faux, la débroussailleuse et le taille-haie.
Qu'est-ce donc qui me bloque et me retient ? La fameuse synthèse de l'HDR (habilitation à diriger des recherches). Cette HDR, qui donne lieu à soutenance, devrait me permettre de diriger des travaux, de fonder un groupe de recherches, et d'accéder au rang de professeur des universités. Or il est notoire que cinq neurones ou six sont insuffisants à si prestigieuse échéance.
Concrètement, la chose se présenterait sous la forme d'un pensum de 150 pages dans lequel je présenterais mes travaux en suggérant qu'ils forment un tout cohérent. Ce n'est pas faux, mais tenir le fil qui va du théâtre à la littérature comparée, de là à l'anthropologie et je l'espère à l'éthologie n'est pas une mince affaire. Le danger principal est la mise en scène de soi, avec la tentation permanente du "j'avais raison contre le monde entier" - dans mon cas, et vu mon état d'esprit, il s'agirait plutôt du "je m'étais encore trompé".
La difficulté de l'exercice tient aussi au fait que ce serait le moment de se lâcher un peu, de lever le pied sur les références et de se mettre un peu en avant (il faut montrer que l'on est apte à diriger des étudiants post-pubères). Mais j'avais fait cela lors de mon doctorat et cela m'avait valu un "je dois vous annoncer que je n'ai pas lu votre thèse" de la part de mon directeur d'alors, Pierre Brunel, en début de soutenance. Trois pages de biblio dont la moitié de Dostoïevski et Dante et Leopardi m'avaient valu une humiliation publique, cuisante, inoubliable. Il faut toujours se préparer au pire. Ci-contre : votre serviteur, blessé au nez, lisant Babar.
Le pire, par exemple, est que parmi ceux qui se présenteront à l'HDR avec moi on compte Philippe Erikson, un modèle et un maître. Je ne me vois pas en position de le concurrencer. Drame, drame. Peut-être le jury sera-t-il sensible au fait qu'à trois ans j'étais un mignon petit garçon ? Qu'en penses-tu, Gérard ?
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