27 aout : Conversation Bigo Nei Marcos
1° transmission : Je leur demande ce qu’on leur a enseigné. Jusqu’à 12 ans, rien, n’avaien tpas le droit de toucher au fusil. Après le père de Bigo lui demandait de l’accompagner pour ramener le gibier. Marcos dit qu’il a tout appris tout seul ; pour la roça, c’est qu’il accompagnait sa mère. Nei dit la même chose, explique juste que sa mère lui a enseigné à torrar la farinha parce que c’est un processus délicat, en deux étapes (d’abord à feu vif puis à feu doux). Retour sur la conversation à propos du fils de Marcos monté sur açai : il est bien monté mais il a jeté le cacho. Ca les a fait rire, le gamin ayant encore bc de choses à apprendre. Il y avait également sur la terrasse un adolescent qui a renoncé à ses études, revenu vivre ici en attendant le service militaire.
2° commerces (Rosende, Vandico père de Paulo Vieira, Rocha) : confirme disparition des marreteiros, ce qu’il est resté ce sont trois commerces : Rosende plus bas, do lado de la, Vandico no igarapé Japim, et Rocha qui avait la loja azul dans la vila. Ils leur vendait des produits : peixe, pele, bréu, cacau, et pour leurs achats ils allaient à Calçoene, il leur fallait trois jours par l’igarapé de agua doce, arrivaient malades. Ils n’emportaient rien avec eux, pas de marchandise, car canoas trop petites, seult l’argent gagné à vendre produits dans les commerces mentionnés. Pour lui c’était la période la plus difficile. Mais aujourd’hui, dit Nei, il y a « l’ouro preto », l’açaï…
3° Baiano – Benvenuto recherché poursuivi abattu, il avait deux compagnons. Du temps des avô. Bigo explique comment lui ont tiré dessus : « nao tem um monte la na roça do domingos, onde tem um abacateiro ?. Il reparle de ces baianos mais cette fois dans une perspective temporelle plus rapprochée: venus en bateau jusqu’à Vila Velha, vararam até aqui. Ce sont eux qui ont fait la tranchée. Eram perseguidos. Du temps des grands parents ??? Les Baianos forment un nœud dans l’Histoire ; ils ne sont pas considérés comme des fondateurs, mais comme des êtres de passage, violents, bagarreurs, violeurs de femmes. Ils étaient armés, poursuivis, recherchés. Je demande s’ils ont quelque chose à voir avec Trajano, Nei me dit que oui, mais c’est parce qu’il l’a lu quelque part, me dit-il. Trajano était un Hollandais selon lui.
Ils reparlent des Igarapé et de leur nom : fascinés par la découverte que les noms des igarapés correspondent à des noms de personnes. Ils évoquent un igarapé Martinica (créole par excellence) un autre qui est saco de farinha (des sacs de farine y sont tombsé)
4° les créoles et l’argent : disent que les créoles, quand ils meurent, font disparaître tout ce qu’ils possèdent. Bigo fantasme sur l’or enterré. Marcos qui est né à Serra do Navio, terre de l’ICOMI, reprend l’histoire du tunnel ; Bigo dit qu’il était passé par ici un tremzinho, tipo trolei (rosa confirme qu’il y avait trilhas, mais ne sait plus où. Marcos explique que ce genre de trolei sert précisément à transporter du minerai. Conclusion : le tunnel devait servir à transporter du minerai de la vila jusqu’à l’igarapé Olimpio pour exportation. Cette question de l’or enterré les travaille, c’est un motif de plaisanterie mais c’est aussi une histoire très présente.
Cela renvoie partiellement à conversation avec Edna hier au poste de santé. Elle a parlé de la loja Azul mais en disant que c’était celle du père de Paulo, donc Vandico. Parlé du collège qui se dressait là où se trouve aujourd’hui le centre communautaire. Parlé des échanges avec marreteiros qui se sont arrêtés quand elle avait 17 ans (elle était allé étudier à Calçoene puis Macapa mais revenait régulièrement) – elle en a 53 aujourd’hui.
Parlé de Prisciliano disant que c’était lui, et lui seulement, l’enfant enlevé par Oyara, qui semble être terme générique désignant esprits de l’eau, capable de se muer en un parent proche pour enlever quelqu’un ou l’égarer (en cela proche du boto ???). Je lui demande ce que sont les karuana : elle me dit que ce sont les (esprits ?) das pessoas experientes. Je ne sais quel mot elle a employé, si c’était « o que esta com as pessoas experientes », « o que acompanha as pessoas experientes ».
18h le soir tombe. Journée extrêmement pénible. Toute la journée d’hier s’est passée dans la tension, il a dû se passer qq chose à Calçoene pour que D. et V. soit ainsi entre elles dans une complicité d'ados.
Mais le résultat de ces cartes que les femmes ont dessinées a été prodigieux. La table d’Olga ayant dessiné le fleuve et le village, elles se sont déclarées insatisfaites, ont réclamé davantage de papier et ont dit qu’elles se réuniraient toutes seules chez Juci pour en faire une selon leur idée. Il en est sorti une carte magnifique sur deux feuilles de papier kraft, d’environ un mètre sur deux, belle, bien coloriée, détaillant chaque maison et chaque igarapé. La forêt n’y figurait pas et il est désolant que les hommes ne se soient pas prêtés à l’exercice. J’ai rarement éprouvé de la fierté dans ma vie, mais ce dessin gigantesque, qui ornera désormais le mur de l’école, est un élément important pour l’avenir de cette communauté, sa mémoire collective et sa confiance en soi. Ca été un cas de conscience car Olga voulait nous offrir cette carte, et j’aurais adoré la prendre, mais j’ai pensé qu’elle risquait de finir dans un dossier d’archive et qu’il valait mieux qu’elle serve de support aux futures leçons du professeur, aux yeux de tous les habitants de Cunani.
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