Deuxième terrain à partir de demain matin. Nous partons ce soir pour être à temps au rendez-vous avec les élus et les représentants associatifs.
Petit problème au sein de l'équipe, à propos de l'usage des questionnaires. J'y suis pour ma part totalement opposé. Il peut être rassurant de quantifier des réponses à ces questions: "Quelle est votre attitude à l'égard de l'environnement", mais j'ai constaté que ceux qui reposaient sur ce type d'outil perdaient tout sens critique et toute faculté d'analyse à l'égard des subtilités.
C'était particulièrement évident à Iratapuru: interrogés sur leur faculté à s'organiser, les habitants se sont répandus en plainte sur telle et telle famille, sur la piètre qualité du système d'approvisionnement en eau, des difficultés à maintenir la petite école, amenant les enquêteurs à décrire la communauté comme dépourvue de contrôle social. Or l'enquête anthropologique démontrait l'inverse: fort sens de la solidarité, réseaux d'entraide bien ancrés, etc.
Pareil pour les cartes mentales: le recueil systématique de cartes dessinées sous la pression rendent celle-ci ininterprétables. La seule carte que nous ayons recueillie à Cunani fourmille de détails que nous pouvons analyser puisque nous avons assisté à sa gestation.
Je comprends qu'il y a ici une profonde divergence entre écologues et anthropologues. Les premiers voudraient optimiser le temps de terrain et obtenir une base de comparaison sous forme de données statistiques. Je cherche à renifler l'air du temps, à regarder la décoration des maisons, à observer les jardins et les plantations, et à appréhender les expressions stéréotypées. L'effort mental est différent.
Nous discuterons de cela dans le train, j'espère que mon irritation va passer.
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