Le jardin pèche par absence d'eau. Beaucoup d'espèces animales rechignent à s'y fixer. Je creuserai un étang un jour, mais en attendant voici un panorama de ce que l'on trouve.
Il n'y a presque plus de vipères. Trois sortes de lézard: lézard vert, de murailles et de souche. Bizarrement j'ai vu plein de lézards verts en février mais aucun en mai (peut-être parce que l'herbe était haute). J'ai vu un orvet réduit en charpie par la tondeuse (je vous épargne la photo). En revanche, le bruit des outils de jardin fait surgir les rainettes de leur cachette - j'imagine qu'elles sont curieuses :
En fauchant, j'ai blessé une petite couleuvre. Elle avait un oeil ensanglanté, je l'ai prise dans la main pour constater les dégâts, mais les couleuvres feignent la mort quand elles se sentent acculées. Donc je n'ai pas su l'ampleur de sa blessure. Je l'ai déposée derrière un tas de bois, et quelques minutes plus tard elle avait filé. Si quelqu'un connaît la faculté de résilience des ophidiens, qu'il me le dise!
Une mésange a fait son nid juste au dessus du réverbère de l'entrée, sous une tuile grecque. J'ai eu la chance de la prendre au moment de l'entrée dans le nid:
Et tout plein de bébés merles un peu partout:
(à suivre)
Lorsque les fleurs sont hautes, les insectes sont si nombreux que les grenouilles se multiplient, attirant les couleuvres, etc. Cela me fait mal au coeur de passer la tondeuse sur tout cela, comme si j'épandais du napalm sur la Beauce ou le Bordelais.
C'était les premiers beaux jours, il y avait encore peu d'insectes, mais assez pour un petit échantillon:
Un coléoptère déguisé en guêpe, sur une feuille de seringa:
Un autre, déguisé en éléphant :
Deux scarabées mordorés, la cétoine et le bousier :
Et trois types d'araignées. La première est une araignée chasseuse, les deux autres sont une variété de grosse dondon qui chasse à l'affût, dissimulée dans la fleur ou sous une feuille :
Pour finir cette section, quelques vues de la forêt, avec un bourdon fugueur et quatre espèces de mousse sur quelques centimètres carrés:
Oups! ça c'était la tombe de Darlingo. Voici la forêt:
à suivre: les autres
D'autres plantes à la croissance étrange, une grande ombellifère et les fougères (quatre variétés):
Bien sûr, il n'y a pas que des plantes spontanées. On trouve également des glycines, des monnaies du pape, des seringas, des rhododendrons...
Le chien apprécie les hautes herbes, les chats beaucoup moins. Ils sont forcés d'aller à la queue leu-leu:
Et quelques arbres remarquables: frênes et châtaigners.
(à suivre)
Je suis revenu hier de Vendée. Ma tante habite une grande et belle maison, flanquée d'un jardin d'un hectare environ, au sommet d'un coteau, donnant sur la Boulogne. Le coteau est planté de chataigners et de chênes. Le jardin, lui, fut remodelé au début du XXe siècle: haies de laurier-cerise, deux pommeraiesaux arbres entortillés, quelques parterres étouffant sous leurs rosiers et les vignes, et une bordure de forêt en pente. Il y a aussi une dépendance, une fermette en ruine. L'ensemble forme un rectangle très allongé, constitué de quadrilatères juxtaposés. Chacun d'eux est une pelouse plus ou moins arborée, du champ ouvert au sous-bois, et on y trouve donc des plantes spontanées, très variées. Jacinthes, campanules, orchidées sauvages, graminées, ombellifères...
Toute la difficulté est de faire accepter à ma tante l'idée qu'un jardin est beau, exubérant de fleurs sauvages, et et qu'il n'est pas nécessaire de le raser, de le "nettoyer", pour l'apprécier. Chaque fois que je vais tondre, ou faucher, ou débroussailler, je blesse ou tue des grenouilles, des orvets, des couleuvres, et je supprime tout moyen de subsistance aux milliers d'insectes qui se trouvent là, dans ces plantes enchevêtrées, et donc aux oiseaux qui alimentent leurs nichées. Le dilemme se trouve toujours placé entre le jardin soigné, aux lignes épurées, mais vide de vie, et l'exubérance dont les humains se sentent un peu exclu. Voici quelques photos, en commençant par la maison.
Ces deux dernières photos montrent les flancs gauche et droit de la maison, pris au moment de mon arrivée. Je fais alors un tour de jardin, pour me faire une idée du travail à accomplir, puis je file faire la sieste. Lorsque l'herbe est à ce niveau, il est inutile de passer la tondeuse: le sol maintient son humidité grâce à la couverture ombragée, et la tondeuse se met à crachoter. Il faut donc faucher ou passer la débroussailleuse à fil, mais grâce à Dieu celle-ci est cassée.
Or ces prairies sont magnifiques pour qui sait les apprécier. De bas en haut : myosotis, graminées, ombellifères (carottes sauvages) :
Ci-dessus, ombellifères. Ci-dessous, jacinthes:
Parmi les plantes adventices, en voici deux que j'apprécie particulièrement, bien que leur apparition soit aléatoire - l'orchidée sauvage et la grande bardane :
(à suivre)
M. la jolie étant allergique aux chats, j'ai décidé d'adopter une plante carnivore:
Eh bien je suis ravi ! Celle-ci s'avère une excellente compagne, à la mobilité proche de celle d'un chat.
Quand on la regarde de plus près, on voit que les poils poussent aussi à l'intérieur des mâchoires :
Mère Nature a donc tout inventé, en l'occurrence ici la Vierge de fer - ou le vagin denté.
Bergère, ne tremble pas (mais rentre tout de même tes blancs moutons) : j'ai découvert un nouveau clone d'anthropopotame.
Le voici :
Eh oui, c'est Wolverine ! Et si l'on fait abstraction des griffes d'acier et des cheveux situés sur la partie centrale du crâne, c'est vraiment un anthropopotame tout craché.
On trouvera, en cherchant bien, d'autres points communs. D'abord, dans notre passé. Nous avons tous deux franchi l'épreuve consistant à être détenus dans un labo militaire puis plongés dans un bain de métal liquide, d'où une très bonne cicatrisation.
Et à propos de cicatrisation, un autre détail qui n'aura pas échappé aux lecteurs : notre pudeur maladive. Nous gardons nos misères pour nous ! Nous n'avons point pour habitude de nous plaindre ni de pleurnicher ! Nos blessures secrètes demeurent secrètes, les autres (voir ci-dessus) cicatrisant très vite.
PS : les étudiants de Neverland ont voté hier la poursuite du blocage par 346 voix contre 250 environ. "Never study" semble être le mot d'ordre.
La séduisante (et gauchisante) E. m'ayant apporté, à l'issue de son défilé du premier mai, une liasse de tracts anticapitalistes, je me délecte à leur lecture, en particulier celui du m-pep (Mouvement politique d'éducation populaire). Je n'ai rien contre la gauche ni contre l'extrême-gauche, et je n'ai jamais de ma vie voté à droite ; ce qui me gêne, c'est la bêtise néolibéralement partagée.
Le M-PEP aligne les mots d'ordre ("République, laïcité, internationalisme") et revendique une série de victoires dans le fil desquelles il s'inscrirait : 1789, 1936, 1945, 1968 et plus mystérieusement, 2005 (le "non" à la Constitution européenne ?). C'est flatteur.
Je passe sur le "passons le niveau sur la tête des riches", et me rends directement en fin de tract, dont voici un fac similé :
NON au caractère antidémocratique, dictatorial, tyrannique de l'Union Européenne !
Comment s'appelle un régime politique - celui de l'Union Européenne - dans lequel le suffrage universel est soit interdit, soit bafoué ? Un régime dans lequel le peuple est bâillonné ?
Il faut ajouter un quatrième non : NON à Sarkozy !
On peut s'étonner qu'un internationalisme proclamé soit aussi violemment antieuropéen, la vocation internationale de l'UE étant pourtant un bon début.
Ce que je trouve amusant, et affligeant néanmoins, c'est l'opprobre jeté sur la démocratie européenne, comparée à un régime fascisant - au nom de l'irrespect des suffrages populaires -, et le "Non à Sarkozy" final, ce même Sarkozy (si ma mémoire est bonne) ayant été élu au suffrage universel.
Mais bah, pourquoi ces mouvements devraient-ils souffrir d'une contradiction qu'ils ne souffrent pas, de toute façon ?
Votre serviteur ayant clamé à tous vents qu'il avait une blessure secrète, et l'ayant décrite par le menu, il est temps d'en venir à quelque chose qui me trouble réellement.
La grippe porcine nous donne l'occasion de regarder d'un peu plus près ce qui se passe dans les élevages de porcs. Notons au passage que les caméras n'y sont que rarement tolérées et qu'il faut bien souvent filmer en cachette. Pourquoi ? Qu'est-ce qui ne va pas dans ces élevages que le public ne devrait pas savoir ?
Pour ma part, l'élevage de porc en France est associé à des images réjouissantes : cochon hilare faisant valoir ses courbes abondantes, grand-père généreux offrant du haut d'un sommet pyrénéen une tranche de jambon à son petit-fils ébloui, le tout accompagné de "tradition qui a du bon" et du "cochonou on l'aime bien chez nous". Cela me suffit, je n'ai pas besoin d'en savoir plus.
Ce qui me trouble, donc, est l'obstination de scientifiques et de journalistes à aller y voir de plus près.
J'ai mentionné à plusieurs reprises les ouvrages de Jocelyne Porcher, en particulier celui qu'elle a écrit en collaboration avec Vinciane Despret (Etre bête, 2007) qui portait sur les vaches laitières.
Accompagnée d'un cameraman, Karim el Hadj, et d'une journaliste, Weronika Zarachowicz, Jocelyn Porcher a permis le tournage de quelques vues dérobées, qu'elle commente sur le site Videoblog. (Je n'ai peut-être pas bien compris, il est possible que Jocelyne Porcher soit elle-même l'auteure de ces images, mises également en ligne sur le site de Télérama)
Le premier film montre les truies en gestation, dans des box métalliques. Ces box les contiennent durant les trois mois et demi que durera leur grossesse. Ils leur permettent de faire un pas en avant, un pas en arrière. Pour s'allonger, elles doivent d'abord s'affaisser, puis se glisser sous la barre qui les maintient. Il va de soi qu'on ne saurait imaginer d'autre moyen de contenir un animal. Il serait absurde, par exemple, de leur permettre de se retourner.
Comme le fait observer Jocelyne Porcher, le maintien d'un animal dans de telles conditions d'inactivité, de manque de stimulation, grossesse après grossesse (deux à trois par an durant les quatre ans où les membres sclérosés maintiendront la truie debout) pose question. Si l'animal était une machine, nous trouverions probablement, dans les emballages de jambon, ou dans le gras du saucisson, des boulons, des ressorts, des rouages, enfin un ensemble de petites pièces qui attesteraient l'origine mécanique des animaux d'élevage.
Le film suivant porte sur la période d'allaitement. Les "produits", au nombre de quatorze à dix-huit, sont répartis parmi les tétines disponibles des truies allaitantes, prudemment entravées afin qu'elles n'écrasent pas leur progéniture. On ne parle pas de porcelets, mais de kilos de viande.
Le dernier montre les conditions d'engraissement. Seule la stalle bétonnée proche de la porte du hangar a été filmée. En effet, la lumière ne pénétrait pas au delà. Tout le monde sait aujourd'hui que les cochons sont élevés dans l'obscurité, cela afin d'étouffer leurs pulsions agressives. Ils sont une dizaine par stalle d'environ 4 à 6 mètres carré. Ces conditions étant totalement contraires aux conditions d'existence normale d'un porc, il est normal de prendre des précautions supplémentaires: castration à froid des verrats, amputation de la queue, rognage des canines, anxiolytiques.
On sait que ce type d'élevage n'est possible que par une mise en condition des éleveurs qui dès l'école d'agronomie et de zootechnie ont été abreuvés de discours réifiant l'animal, le réduisant à l'état de chose, de machine à produire quelqu'autre chose (oeuf, viande, lait) et les jeunes éleveurs, lorsqu'ils s'installent, s'accrochent à ces mots-là qui les sauvent d'interrogations douloureuses. Des bourreaux volontaires dont les officines sont maintenues au secret, au profit de grands espaces, de saucisses grillées en toute convivialité, de rillettes renvoyant à des "valeurs".
Le site Videoblog, dans sa note "Les porcs des barbares", renvoie à l'article de Weronika Zarachowicz publié dans Télérama en août dernier, intitulé "la Barbarie à usage humain", où la réflexion porte sur l'ensemble du système zootechnie/industrie alimentaire. Il est rappelé que plus de 95% de la viande de porc mise sur le marché provient de ce type d'élevages, dont on connaît par ailleurs les impacts environnementaux. Les élevages industriels drainent, on le sait depuis peu, des sommes conséquentes issues de l'Union Européenne à titre de subvention à l'exportation.
Il est bon de savoir qu'indépendamment du fait que j'achète ou non de la viande de porc élevé dans ces conditions, je contribue à financer ces élevages d'une part grâce aux subventions agricoles, d'autre part en payant, en tant que contribuable, la réparation des dégats environnementaux provoqués par la concentration d'animaux rejetant des tonnes d'urines chargées d'antibiotiques et d'anxiolytiques dans les cours d'eau, tandis que leur fumier est épandu sur les champs cultivés.
Il n'est pas bon d'évoquer, au Pays des Droits de l'Homme, le droit des porcs à mener une existence conforme à leur phylogenèse, d'animal omnivore, intelligent, éminemment adaptable et curieux. Manger du porc ne me pose pas de problème particulier. Paradoxalement, si je n'en mange pas, c'est précisément à cause de ces conditions d'élevage et de la quasi impossibilité de découvrir un éleveur ayant un tant soit peu d'éthique.
Pour le lecteur blindé, un petit film qui récapitule les étapes évoquées, trouvé sur YouTube (au passage, ce type de film serait autrement plus convaincant si son origine et ses dates et lieux de tournage étaient évoqués. Toutefois, je le place ici car il concorde avec l'ensemble des témoignages dont on dispose) :
NB : W. Zarachowicz animait un débat confrontant Elisabeth de Fontenay et Jocelyne Porcher, en juin 2008. Rapport historique de familiarité avec l'animal : c'est ce que J.P. appelle "l'élevage", lui opposant l'industrie pure et simple qui produit des poulets, des porcs, du lait. Je suis un peu fâché de voir qu'Elisabeth de Fontenay est systématiquement invitée à ces débats. Elle n'est ni particulièrement médiatique, ni profonde. Je n'ai pas lu, sous sa plume, une idée originale.
Sur le même sujet, dans Anthropopotame :
"La philosophie dans le salon de thé"
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