Longue conversation sur Schopenhauer, dans le train, avec une collègue.
Elle m'expliquait avoir reçu en cadeau la nouvelle traduction du Monde comme Volonté et comme Représentation mais peiner à la lire. Je lui ai raconté comment on pouvait lire Schopenhauer, en riant. Il suffit de connaître un peu le personnage, et soudain ce qu'il raconte est le roman d'une vie: la vie d'un homme qui cherche, comme chacun de nous, à créer des systèmes explicatifs, c'est-à-dire de produire un monde qui lui serait adapté.
Il ne faut donc pas le lire comme un philosophe, mais comme un artiste ou un religieux aux prises avec cette question: comment expliquer ce monde par autre chose qu'il est, par des principes extérieurs à lui?
Clément Rosset parle à ce sujet "d'illusion métaphysique", c'est-à-dire de "l'illusion d'une métaphysique", au coeur de tout système religieux et plus généralement au coeur de toute philosophie qui fait l'économie de la réalité pour proposer ses propres systèmes de représentation - ce qu'on pourrait appeler "cosmogenèse" ou production de cosmologie.
Nous en parlions encore quand le train s'est arrêté à Montparnasse, et la conversation a dérivé sur les cadeaux de Noël. Mais je dois dire que je suis pénétré d'affection pour Schopenhauer, cet homme mal dans sa peau, qui poussait des concierges dans les escaliers, légua ses biens à son caniche, se faisait expulser des cafés, mais écrivait tout de même des traités sur l'Art de vivre heureux...
Schopenhauer, Nietzsche, Cioran: trois étoiles au firmament des penseurs drôles et tragiques.
http://www.lemonde.fr/planete/article/2011/12/02/le-mystere-des-vaches-magnetiques_1611965_3244.html
Rédigé par : hh | vendredi 02 déc 2011 à 16:59